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Salaire ou Dividende : Le Guide Complet pour Dirigeant de SARL et SAS

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    Emilien Gaillard
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Salaire ou Dividende : Quelle Rémunération Choisir ? (Guide Complet & Chiffré)

C'est la question qui hante les nuits de tout dirigeant d'entreprise à l'approche du bilan : faut-il se verser un salaire mensuel ou attendre la fin de l'année pour prendre des dividendes ?

La réponse courte ? Cela dépend de votre statut (SAS ou SARL) et de votre appétence au risque. Mais attention, l'optimisation fiscale a ses limites : le "tout dividende" est une stratégie risquée qui est dans le collimateur de l'Urssaf et du Fisc.

Voici le guide complet, avec un exemple chiffré concret, pour faire le bon choix.

1. Les Forces en Présence : Salaire vs Dividende

Avant de sortir la calculatrice, rappelons les fondamentaux.

Le Salaire (ou Rémunération de Gérance)

C'est la voie de la sécurité.

  • Avantages : Protection sociale complète (retraite, maladie, prévoyance), déductible du bénéfice de l'entreprise (donc baisse l'IS), régularité des revenus.
  • Inconvénients : Coût élevé pour l'entreprise (charges sociales).
  • Différence SAS/SARL :
    • SAS (Président) : Assimilé Salarié. Charges très élevées (~75-80% du net), très bonne protection (sauf chômage).
    • SARL (Gérant Majoritaire) : TNS (Travailleur Non Salarié). Charges modérées (~45% du net), protection moindre.

Le Dividende

C'est la voie de la rentabilité immédiate (en apparence).

  • Avantages : Pas de charges sociales en SAS (juste CSG/CRDS), fiscalité souvent plus douce (Flat Tax 30%).
  • Inconvénients : Aucune protection sociale (pas de retraite validée !), non déductible de l'IS (on paie l'impôt société avant de distribuer), décalage de trésorerie (fin d'année).

2. Exemple Chiffré : Comparatif sur 100 000 €

Prenons un cas concret pour comparer. Imaginons une société qui a dégagé une enveloppe de 100 000 € disponible pour la rémunération du dirigeant (avant tout impôt ou charge).

Note : Les chiffres sont des estimations arrondies pour la démonstration.

Tableau Récapitulatif

ScénarioEnveloppe Totale (Coût Entreprise)Charges/Impôts Payés par l'EntrepriseNet Perçu (Avant Impôt Perso)Fiscalité Personnelle (Coût Particulier)Reste à Vivre (Net Poche)Protection Sociale
SAS Salaire100 000 €- 45 000 € (Charges Sociales)55 000 € (Salaire Net)À payer selon barème IR (ex: ~10k€)~ 45 000 €Excellente
SARL TNS100 000 €- 30 000 € (Charges Sociales)70 000 € (Rémun. Nette)À payer selon barème IR (ex: ~14k€)~ 56 000 €Moyenne
SAS Dividende100 000 €- 20 750 € (Impôt Société)79 250 € (Dividende Brut)- 23 775 € (Flat Tax 30%)55 475 €Nulle

Analyse détaillée des coûts

Il est crucial de distinguer qui paie quoi :

  1. SAS Salaire (100% Salaire)

    • Coût Entreprise : L'entreprise décaisse 100 000 €. Une grosse partie part en charges sociales (Urssaf, retraite) directement. C'est une charge déductible, donc cela réduit le bénéfice imposable de la société à 0 € (pas d'IS à payer sur cette somme).
    • Coût Particulier : Vous recevez 55 000 € net sur votre compte. Vous devrez ensuite payer votre Impôt sur le Revenu (IR) personnel sur cette somme l'année suivante.
  2. SARL TNS (100% Rémunération)

    • Coût Entreprise : Le statut TNS (Travailleur Non Salarié) est moins chargé. Pour le même coût total de 100 000 €, l'entreprise paie moins de charges.
    • Coût Particulier : Vous recevez plus de cash (70 000 €). Mais attention, comme vous gagnez plus, votre Impôt sur le Revenu personnel sera mécaniquement plus élevé.
  3. SAS Dividende (100% Dividendes)

    • Coût Entreprise : Ici, le piège ! Le dividende n'est pas une charge. Il se prend sur le bénéfice après impôt. L'entreprise doit d'abord payer l'Impôt sur les Sociétés (IS) sur les 100 000 € (environ 20 750 €).
    • Coût Particulier : Il reste 79 250 € à distribuer. Sur cette somme, l'État prélève la Flat Tax (30%) au moment du versement. Vous touchez donc 55 475 € net d'impôt.

Verdict

Le "tout dividende" (55 475 € net) arrive finalement au même niveau que le salaire net après impôt, mais sans aucune couverture sociale ni retraite. C'est souvent un mauvais calcul à long terme. La SARL reste mathématiquement la plus performante pour le "cash immédiat".


3. Attention Danger : Le Piège du "Tout Dividende"

Il peut être tentant, notamment en SAS, de ne se verser aucun salaire pour éviter la lourdeur administrative des fiches de paie et "sortir du cash" via la Flat Tax. C'est une très mauvaise idée.

Risque n°1 : La Requalification en "Salaire Déguisé"

C'est le point crucial. Si vous êtes dirigeant actif (vous travaillez au quotidien pour la société) mais que vous ne vous versez aucun salaire, l'administration (Urssaf et Fisc) peut tiquer.

L'Urssaf peut considérer que les dividendes versés rémunèrent en réalité un travail. Ils peuvent invoquer l'abus de droit pour requalifier ces sommes en salaires.

  • La conséquence ? Rappel de toutes les cotisations sociales (URSSAF, Retraite) sur les montants versés, majorations de retard et pénalités. La facture peut être catastrophique et mettre la société en faillite.

Bien que la jurisprudence soit plus clémente avec les SAS qu'avec les SARL sur ce point, le risque fiscal d'abus de droit (montage artificiel dans le but exclusif d'éluder l'impôt/cotisation) existe bel et bien.

Risque n°2 : La Taxe PUMA

Si vous n'avez aucun revenu d'activité (pas de salaire), vous risquez d'être redevable de la Taxe PUMA (Protection Universelle Maladie). C'est une cotisation subsidiaire maladie qui vient taxer vos revenus du capital (dividendes) si vous n'avez pas assez cotisé par le travail. Cela réduit encore la rentabilité du montage dividende.

Risque n°3 : La protection sociale inexistante

Avec 0 € de salaire :

  • 0 trimestre de retraite validé.
  • Aucune couverture en cas d'accident grave ou d'invalidité.
  • Difficulté extrême pour louer un appartement ou faire un emprunt bancaire (les banques détestent les revenus de dividendes, jugés instables).

Conclusion : La Stratégie Gagnante

Ne mettez pas tous vos œufs dans le même panier.

  1. Le Mix (SAS) : Versez-vous un salaire minimum (au moins de quoi valider vos 4 trimestres de retraite et couvrir vos besoins vitaux) pour assurer la protection sociale et la "respectabilité" bancaire. Prenez le surplus de bénéfices en dividendes.
  2. L'efficience (SARL) : Privilégiez la rémunération mensuelle (TNS) qui est fiscalement très efficace, et gardez les dividendes pour des montants minimes, car ils sont chargés socialement en SARL.

Dans tous les cas, l'enregistrement comptable de ces opérations est strict. Assurez-vous de maîtriser l'écriture comptable de distribution de dividendes et celle des salaires.